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Photographie de Claude Venezia
"J'imagine parfois que la trace de nos déplacements au cours de l'existence pourrait être cartographiée. Ce dessin sur la carte du monde serait une métaphore de notre passage. Je vois cette ligne courir de place en place, se surligner par le nombre d'allers et de retours effectués sur les mêmes lieux, s'éloigner, revenir, croiser les lignes déja parcourues, se fixer en un point et ainsi de suite, depuis notre naissance jusqu'à notre fin. L'image révélerait-elle une signification cachée ? La photo reste encore aujourd'hui prétexte à satisfaire ma curiosité, fil conducteur vers de nouvelles rencontres. Tout au long de ma vie, j'ai marché à travers villes et campagnes, souvent sans intention précise, sinon celle de frotter ma pensée à la surface du monde, m'étonner de sa diversité. J'ai croisé des visages, des corps, attrapé des paroles au vol. Je me suis toujours tenu prêt "face à ce qui se dérobe" (Henri Michaux). "
Claude Venezia, photographe
Dans l'émission de la 5, "La Grande Librairie",
Lionel Duroy explique
à propos de son dernier roman, "Colères",
son rapport à l'écriture, autobiographique :
il essaie de...
"écrire sur la façon dont on se débrouille
pour inventer sa vie".
Inventer sa vie.
Trouver sa route.
Savoir s'écarter
de celles que les parents,
les amours, la société...
essaient de tracer pour nous.
Mais il n'y a pas de carte routière pour ça.
Juste les livres que l'on croise en chemin...
Erich Scheurmann. Le Papalagui : Les étonnants propos de Touiavii, chef de tribu, sur les hommes blancs. Pocket, 2004. ISBN : 2-266-13032-3
Erich Scheurmann est un peintre, écrivain et conteur allemand. Peu avant la 1ère Guerre Mondiale, il se rend à Samoa, en Polynésie. Il en rapporte ce texte, présenté comme un recueil d'observations et de réflexions sur la civilisation occidentale par un chef de tribu, au retour d'un voyage en Europe. Paru en 1920, il n’a été traduit en français qu’au début des années 80. Près d'un siècle plus tard, le Papalagui, qui désigne le Blanc, et présente ses habitudes de vie, est toujours d’une étonnante actualité ! Beaucoup de thèmes abordés font écho à des interrogations et réflexions contemporaines sur le rapport à la nature, l'écologie, le gaspillage... Sur quoi reposent nos choix ? Peut-on vivre autrement ?...
Quelques extraits :
À propos des villes – p. 33
« On a du mal à saisir qu’un être humain ne meure pas ici, que de nostalgie, il ne devienne pas un oiseau, qu’il ne lui pousse pas des ailes pour s’élever et voler où se trouvent l’air et le soleil. »
À propos des objets – p. 58
« Quand l’homme a besoin de beaucoup de choses, il est d’une grande pauvreté, car il prouve en cela qu’il est démuni des choses du Grand-Esprit. Le Papalagui est pauvre, parce qu’il est possédé par les objets. Il ne peut plus vivre sans les objets. »
À propos du temps – p. 67
« Le temps voulu a beau être là, il ne le voit même pas avec la meilleure volonté du monde, et il invoque 1000 choses qui lui prennent son temps. Grincheux et râleur, il reste cloué à son travail, pour lequel il n’éprouve ni joie, ni plaisir, et auquel personne d’autre ne le contraint que lui-même. Mais s’il voit soudain qu’il a le temps, qu’il est bien là, ou si un autre le lui donne (les Papalaguis se donnent souvent du temps l’un à l’autre, rien n’est aussi apprécié que ce don), alors le désir lui manque à nouveau, ou il est fatigué de son travail sans joie. Et régulièrement, il remet à demain ce qu’il a le temps de faire aujourd’hui. »
À propos du journal – p. 110
« Le journal est aussi une sorte de machine qui fabrique quotidiennement des pensées nouvelles, beaucoup plus que ce qui peut émerger dans une seule tête. Mais la plupart de ces pensées sont faibles et ternes, elles remplissent bien notre tête de beaucoup de provisions, nous ne la rendent pas plus forte. Nous pourrions aussi bien remplir notre tête de sable. Le Papalagui bourre sa tête de cette nourriture inutile des papiers. Avant d’avoir pu rejeter une bouchée, il en reprend déjà une nouvelle. »
À propos des pensées – p. 116
« Le Papalagui pense tant que penser lui est devenu une habitude, une nécessité et même une obligation. Il faut qu’il pense sans arrêt. Il parvient difficilement à ne pas penser, en laissant vivre son corps. Il ne vit souvent qu’avec la tête, pendant que tous ses sens reposent dans un sommeil profond, bien qu’il marche, parle, mange et vive. […] Il vaut mieux ne pas penser du tout quand le soleil brille. »